Film d’animation en noir et blanc de Peter Kassovitz, père de Mathieu Kassovitz, réalisé d’après les dessins de Saul Steinberg où, à partir du geste originel du dessinateur – un simple trait de plume – se déploie un long travelling qui révèle l’imagination graphique fertile et délirante du célèbre dessinateur américain. La ville et l’univers urbain y sont omniprésents : pont suspendus, activités portuaires, centrales électriques, transport en commun, architecture multipliée, juxtaposée, faisant référence à une véritable géographie mentale qui replace l’homme au cœur d’une réflexion sur la ville dans cette immense fresque humoristique.
S’inscrivant dans la série « Banc d’essai », ce film est représentatif du large champ de production qui caractérise les films du Service de la Recherche en s’ouvrant cette fois -ci à l’univers du dessinateur New-Yorkais, Saul Steinberg, célèbre aux Etats-Unis pour ses dessins satyriques publiés dans « Dessins », « Passeport », « Art of living » et dans « The New-Yorker ». Au delà du dessin, le film s’ouvre également aux recherches calligraphiques de Steinberg où l’écrit prend également valeur de dessin, notamment dans le générique de début qui met en scène aux différents postes du film des signatures improbables. La musique électroacoustique de Bernard Parmegiani, prend le parti de l’illustration, bruitant non sans humour également et au plus près de l’image et du montage, une figuration de l’image à travers le mouvement des formes dans le cadre. Ce film reçut la mention de qualité CNC en 1964. Production : Service de la recherche, 1964 Musique de Bernard Parmegiani
Cette notice d’information a été coproduite avec l’INA/GRM pour la création de la fresque multimédia – Artsonores – L’aventure électroacoustique, dans la catégorie Films issus du Service de la Recherche de l’ORTF de 1950 à 1975.
Rythmes est un tableau représentatif de la longue série homonyme de peintures ou de reliefs créés par Robert Delaunay entre 1930 et 1938. Il atteste la radicalisation de ses recherches et le retour sur les formes circulaires. Il adopte le principe d'une composition fendue par une ligne de disque déroulée en diagonale sur le fond neutre, pour lui donner sa mobilité et son élan. le choix d'un module circulaire central, représentatif du support sur vinyl, décliné en noir et blanc, renforce le caractère inobjectif et optique de l'oeuvre, dont le rythme visuel est crée par les rapports de couleurs.
Rythme, joie de vivre, 1930
Centre Georges Pomidou, Paris.
Delaunay déclinera également la formule ans des compositions verticales, comme Rythme sans fin, 1934, où les disques sont entraînés dans un mouvement qui dresse cers le ciel les "colonnes sans fin" de Brancusi. Delaunay renoue alors avec la figure du disque coloré réinterprétant son approche du "cubisme orphique" des années 10. Le sens du mot "orphisme" fait clairement référence au poème d'Apollinaire Orphée (1908), qui traite de poésie pure, telle une sorte de « langage lumineux ». Une autre interprétation de ce terme est proposée : Le nom fait l'analogie de cette peinture avec la musique, en effet au début du XXe siècle la musique représentait l'art moderne par excellence, parfaitement abstraite donc pure et comportant une fonction totalisatrice. Elle pouvait réunir tous les arts, comme dans les opéras de Richard Wagner à travers le concept d'art total à travers le Gesamtkunstwerk)
Le film est réalisé à partir des œuvres du photographe Pierre Cordier, que l’artiste nomme Chimigrammes, des images photographiques aux couleurs et aux graphismes divers obtenues directement sur du papier en y versant des produits chimiques.
La composition destinée à accompagner des images est une constante dans l’œuvre de Bernard Parmegiani. Ainsi, se trouvent répertoriées dans son catalogue, plus de soixante compositions et participations à l’élaboration d’une bande sonore pour le cinéma ou la télévision. Avant même de débuter la composition de son Etude de stage en 1961, Bernard Parmegiani a déjà travaillé à la création sonore pour plusieurs courts métrages obéissant à des techniques cinématographiques spécifiques. Tout comme Ivo Malec avec Reflets, son étude de stage sert de canevas pour le montage de Chimmigrammes. Son originalité, outre les trucages à la prise de vues, réside dans son montage qui a été fait en 1/10 de seconde en essayant de trouver à chaque instant l’équivalent visuel de l’objet sonore et de son développement dans le temps. « Les cinéastes étaient très friands de musique concrète de par la singularité des sons que nous leurs proposions. Eux-mêmes gens de l’image, étant déjà un petit peu dans l’expérimental avec leur recherche visuelle, qu’il s’agisse d’images réelles ou d’images animées, cultivaient le pléonasme, recherchant également des musiques qui pouvaient receler un caractère expérimental. Nous poursuivions comme eux une certaine recherche dans la matière sonore. De plus c’était un travail très artisanal, un travail à la pièce, qui convenait fort bien, c’était du sur mesure pour les cinéastes d’animation. Nos idées sonores précises venaient leur donner d’autres idées, c’était vraiment du « cousu main » que nous accomplissions, c’est à mon avis les deux raisons pour lesquelles les cinéastes d’animation aimaient beaucoup ce genre de musique ».
Production : Service de la Recherche de l’ORTF, 1962.
Musique de Bernard Parmegiani
Cette notice d’information a été coproduite avec l’INA/GRM pour la création de la fresque multimédia – Artsonores – L’aventure électroacoustique, dans la catégorie Films issus du Service de la Recherche de l’ORTF de 1950 à 1975.
Nine Bells est une des œuvres clés de Tom Johnson. La pièce propose un ensemble de cloches suspendues selon une grille de trois par trois, chaque cloche se situant approximativement à six pieds de sa voisine. Le dispositif scénique de Nine Bells constitue à la fois une installation musicale et une performance du percussionniste qui circule à l’intérieur et autour des cloches selon une déambulation précise d’après des formes géométriques variables tout au long des neuf parties qui composent l’œuvre.
Né dans le Colorado en 1939, Tom Johnson a étudié à l’université de Yale et avec Morton Feldman. Après 15 ans à New York, il s’installe à Paris, où il habite depuis 1983. Tom Johnson est généralement considéré comme un minimaliste : il travaille avec du matériel toujours réduit, en procédant toutefois de manière nettement plus logique que la plupart des autres minimalistes. Ce qui se traduit par un emploi fréquent de formules, de permutations et de séquences prévisibles. La production du compositeur Tom Johnson est à la fois large et vaste, comprenant de nombreuses voies d’expression, incluant l’opéra, des pièces pour la danse, le piano, les ensembles de chambre et orchestres.
7ème Mouvement :
Extrait de la représentation à Ecole Supérieure d'Art du Mans par Adam Weisman.
Le terme de caustique désigne en optique l’enveloppe des rayons lumineux subissant une réflexion ou une réfraction sur une surface courbe et brillante. Gérard PATRIS et Jacques BRISSOT n’ont pas cherché dans ce film à capter le processus scientifique de formation d’une caustique, mais ont préféré utiliser les fabuleuses images lumineuses qui résultent des propriétés de la lumière réfléchie pour en fixer la magie du mouvement et la lente beauté à travers la caméra. Dans les productions du Service de la Recherche, ce film s’inscrit dans une des recherches fondamentales qui sont initiées dans le but d’établir une forme de langage entre les objets sonores et les objets visuels. L’expérience du film se prolonge jusque dans la fusion des images et de la musique pour créer une véritable alchimie audiovisuelle, sorte de “caustiques cinématographique” où, dans un ballet délicat et flottant, la réflexion du son tend à se répercuter sur l’image et inversement, la réfraction de l’image se fondre dans le son. Bien que provenant de sources audio-visuelles différenciées – l’image ne provient pas du son et inversement le son ne provient pas de l’image – la relation audiovisuelle s’établit au niveau du mouvement audiovisuel sur l’écran, dans la morphologie des objets visuels et sonores, la vitesse de leur mouvement, la juxtaposition des images et des sons par mixage et surimpression, une rencontre poétique de l’image et du son, dans le sillage des œuvres à portée synesthésique qui oscillent entre l’entrelacement et l’évitement.Dans Le contrepoint du son et de l’image, Pierre SCHAEFFER a qualifié ce film d’« exemple caractéristique » du groupe, marqué par « l’analogie » : on filme les surfaces réfléchissantes de plaques métallisées accompagnées d’une musique utilisant leurs sonorités « tout comme le bastringue convient aux Westerns et la Musique douce à l’amour ».
Date de production : Service de la recherche de l’ORTF, 1959
musique de François Bernard Mâche.
Cette notice d’information a été coproduite avec l’INA/GRM pour la création de la fresque multimédia – Artsonores – L’aventure électroacoustique, dans la catégorie Films issus du Service de la Recherche de l’ORTF de 1950 à 1975.
Haut-parleur, cordes de violon, archer, 250×100 cm
Centre Georges Pompidou, Paris.
Lorsque Vassilakis Takis rencontre Marcel Duchamp en 1961, ce dernier fréquente régulièrement John Cage et l’avant-garde musicale new-yorkaise qui gravite autour de lui. C’est alors qu’il intègre dans ses pièces non seulement l’usage de haut-parleurs mais aussi les nouvelles idées que colporte le musicien. Marqué par la pensée Zen et la volonté d’évacuer de ses œuvres toute forme de message, de discours, John Cage compose, en 1952, son œuvre en trois mouvements, 4’33’’ de Silence, s’inspirant lui-même d’un triptyque de monochromes blancs réalisé peu avant par son ami Rauschenberg. En concevant ses Musicales, qui font correspondre surface monochrome et son monotone, Takis s’inscrit consciemment dans cette filiation d’idées.
Le seul son que diffuse cette œuvre n’impose, de fait, aucune mélodie. Le battement qu’elle fait retentir n’est pas exactement régulier. Le visiteur reste libre de respirer à son rythme. Suspendue à un câble, comme un fil à plomb d’architecte ou un pendule de médium, une baguette de métal se balance et vient inexorablement se cogner contre la corde de métal tendue, qui l’attire à elle dès que le courant la traverse. La corde est ainsi à la fois l’instrument de ce son et son propre instrumentiste.
Ces Musicales donnent ainsi à voir le son et à entendre les matériaux. Le son donne à entendre l’objet qui l’a produit, il est en quelque sorte son « âme déployée dans l’espace », pour reprendre les termes de Cage.
Robert Rauschenberg (Port Arthur, Etats-Unis, 1925), ORACLE, 1962 – 1965.
Tôle galvanisée, eau et son.
236 x 450 x 400 cm.
Billy Klüver, ingénieur du son, a installé le système électro-mécanique.
Don de M. et Mme Pierre Schlumberger en 1976 au musée d'art moderne Georges Pompidou.
Baignoire avec douche (178 x 115 x 60 cm), escalier (149 x 140 cm), montant de fenêtre (158 x 236 x 47 cm), portière de voiture (160 x 133 x 85 cm), tuyau (143 x 116 x 73 cm).
Dans les années 1950, Rauschenberg développe une pratique fondée sur le collage d'objets divers empruntés à différents domaines de l'expérience et de la culture. Réalisée en collaboration avec Billy Klüver, Oracle est une sculpture en cinq éléments constitués d'un assemblage d'objets de récupération (portière de voiture, conduits de ventilation, fenêtre, baignoire avec douche, escalier) appartenant au monde de la technologie quotidienne, auxquels est intégré un système de radios captant diverses émissions du lieu où est présenté la pièce. les cinq éléments ont chacun une structure et un fonctionnement particuliers. proches de certaines sculpture de Tinguely, cet environnement de machiner vivant leur vie propre est plus tragique que ludique. présentée en 1965 à la galerie Léo Castelli (NYC), cette oeuvre était conçue comme une oeuvre interactive : les spectateurs se mouvaient à l'intérieur des éléments et pouvaient modifier les programmes radio. Chacun des éléments comportent une batterie, un post-récepteur et un haut-parleur.
Oracle est une sculpture interactive. Les récepteurs balayaient les longueurs d'onde des radios New-yorkaises ; télécommandé par le spectateur, un moteur permettait de passer selon une vitesse variable d'une longueur d'onde à une autre, comme pour prendre au piège les messages sonores d'une ville. Les bruits de la métropole moderne constituent ici un matériau sonore dont le public, armé d'une télécommande, pouvait faire varier la vitesse.
Chaque morceau mobile de sculpture contient un moteur. Ce moteur déplace sans interruption le cadran d'une radio sur la bande AM. Le visiteur peut commander la vitesse du moteur et le niveau sonore de la radio dans chaque partie de la sculpture en tournant les boutons.
Ce projet est le résultat de trois ans de collaboration entre Rauschenberg et Billy Klüver.
L'œuvre a été présentée pour la première fois à la galerie Leo Castelli en 1965 et à l'exposition « The machine as seen at the end of the mechanical age » (« La machines considérée à la fin de l'ère mécanique ») organisée pas Pontus Hulten au musée d'art moderne de la ville de New-York.
Ici, la sculpture est composée de l'utile hors d'usage.
Dans cette œuvre, Robert Rauschenberg mêle art et technologie. Il ne voit pas la technologie comme une force à éviter ou l'influence de la déshumanisation de la société1. Pour lui, la technologie est la « nature contemporaine »2 et il représente souvent les interactions hommes / machines dans son travail. Pour lui, les problèmes environnementaux ou l'industrie militaire grandissante ne peuvent être résolus par à un retour à un mode de vie plus simple.
Les éléments qui composent l'installation sont autant d'objets de récupération (baignoire avec douche, escalier, montant de fenêtre, portière de voiture, conduits de ventilation), appartenant au monde de la « technologie quotidienne ». Des objets banales, quotidiens, sortis de leur contexte, soustraits au rôle socialement codifiés.
Ces objets « précaires » contrastent avec la technologie avancée de l'installation sonore conçue par Klüver.
L'esprit de collaboration marque le style de Robert Rauschenberg. Avec Klüver, il voit la participation du travail de l'ingénieur à celui de l'artiste comme la solution pour un monde plus humain.
Ainsi, il crée avec Klüver (ingénieur), Robert Whitman (artiste) et Fred Waldhauer (ingénieur) l'Experiments in Arts and Technologie (E.A.T.), une association permanente dans laquelle des artistes et des scientifiques mêlent leur travail sous le patronage industriel. L'organisme est destiné à orienter les recherches des artistes dans les nouvelles technologies.
Comme eux, les futuristes italiens, les constructivistes russes ou encore les artistes du Bauhaus s'étaient déjà tournés vers l'industrie pour exprimer leurs idées.
Rauschenberg commence à assembler les pièces pour Oracle dès le début 1962, pendant que Klüver crée le système sonore. Rauschenberg lui demande de concevoir un système contrôlable par le spectateur.
Klüver installe des radios dans chaque partie de la sculpture. Chaque radio capte des bribes d'émissions de toutes les radios de la bande A.M de New York (la F.M était trop « high-class » et « ésotérique » pour Rauschenberg.)3.
La collaboration entre Rauschenberg et Klüver pour Oracle aura duré trois ans.
Pour éviter de câbler entre les sculptures, un signal est émis depuis un panneau de contrôle central situé dans une des sculptures qui est relayé par un petit transmetteur et qui commande les autres.
Les objets, les mots, la musique se mêlent. Rauschenberg trouvait que « The waves of radio sound made the room a funhouse. »4 (« Le son des ondes radio remplissaient la pièce de joie »).
Alan Salomon écrivit : « Fives pieces in the round with sound. »5 Cela résumait bien la composition de l'assemblage.
Il faut rappeler l'influence décisive sur Rauschenberg de l'enseignement du compositeur John Cage au Black Montain College, son goût pour le mélange des catégories, l'ouverture de l'œuvre sur la vie. Ainsi, dès 1953, ses œuvres intègrent toutes sortes d'objets et de matières hétéroclites, n'appartenant pas au registre habituel de l'art. Ces montages où se mêlent objets trouvés (bouteilles, chaises, ficelle, etc.), déchets, matières naturelles et journaux, Robert Rauschenberg les nomme « Combine Paintings », c'est à dire des œuvres combinées qui évitent les catégories (peinture, sculpture, collage). Oracle est une transposition dans l'espace et le son des ses premières Combine Paintings.
Rauschenberg avait déjà utilisé trois radios dans sa Combine Painting de 1959 « Broadcast » et dans une série de peinture de 1960 desquelles émergeaient des sons que chaque spectateur pouvait contrôler. Il avait également conçu un « environnement sculptural » dans le labyrinthe du Stedlijk avec Tinguely et Niki de Saint Phalle, dans lequel il avait incorporé le son d'une pompe électrique qui envoyait de l'air dans un tube rempli d'eau et des horloges qui tournaient à des vitesses différentes.
En 1997, Experiments in Art and Technology fabrique et installe un nouveau système avec la participation financière de Robert Rauschenberg et en fait don au centre Georges Pompidou.
Pour Rauschenberg, Oracle représente l'aboutissement d'une recherche sur les collages sonores, destinés à entrer en contrepoints avec les collages visuels. Pour Jean-Yves Bosseur, Oracle permet de vivre et d'entendre la réalité dans ce qu'elle a de fondamentalement expérimentale. Pour lui, voir et entendre dans le présent rompt avec l'illusion artistique.6
Rauschenberg souhaitait créer une sculpture comme un orchestre dans laquelle le spectateur pouvait être le conducteur. Les radios diffusent une cacophonie continuellement changeante de sons issus du monde réel qui émanent de chaque pièce de la sculpture. Oracle ouvre un contact auditif avec la ville, il est un concentré de sa situation. L'œuvre est à la fois finie et non-finie, elle obéit à une programmation précise mais son programme est modulable et ouvert. L'ambiance feutrée du musée est rompue par une circulation d'eau et de sons. Cette association eau – son est troublante par le contraste établit entre l'émission d'une musique naturelle et celle d'une musique fabriquée.
Alan Salomon, dît alors qu'Oracle reflétait le sens de l'humour spécial de Rauschenberg ainsi que son hilarant sens de l'absurde juxtaposition.7
Un oracle dans le Littré est, chez les païens, la réponse de la divinité à ceux qui la consultaient ; elle se rendait dans les temples et autres lieux consacrés par la religion. La divinité même qui rendait des oracles. (Aller consulter l'oracle).
Ainsi, Oracle représentant la vie quotidienne (baignoire, fenêtre, tôle, etc. trouvés dans les rues de New-York) serait la divinité, ce en quoi nous croyons (en matériel, objets de consommation) qui plus est située dans le temple de l'art, le musée. Cette divinité moderne nous dévoilerait l'oracle, les bruits de la ville, la musique, la radio tel un message brouillé. Le son confère à l'œuvre ses caractères dramatique et drôle de plus que le spectateur peut lui même changer la fréquence de l'oracle. Le son fait ici partie intégrante de l'intention de Rauschenberg de mêler l'art et la vie. La vie quotidienne avec des objets et des sons quotidiens. On capte simultanément Alger, Paris, Budapest, Milan. Les radios nous rappellent la dimension universelle du sujet moderne : le monde est un collage hétéroclite de sons simultanés.
Les sons que l'on entend ne se reproduiront plus. L'Oracle est ici une divinité bien précaire, le sens qu'il délivre n'est jamais définitif, la vérité est un devenir perpétuel.
Proche de certaines machines de Tinguely (qui a également créé des sculpture radiophoniques), cet environnement de machines vivant de leur vie propre, interrogeant les relations de la Junk Culture et de la technologie, est cependant chez Rauschenberg plus tragique que ludique.
Anaïs Rolez
1KOTZ, 1990. P. 134.
2Ibid.
3Ibid.
4Cité in KOTZ, 1990. p. 135.
5Phrase écrite par Alan Salomon dans le carton d'invitation pour la première exposition d'Oracle à la galerie Leo Castelli de New York en 1965.
6BOSSEUR, 1998. P. 82.
7Cité in KOTZ, 1990. p. 135.
Ce film évoque la saison de l’automne dans une dimension cinématographique néo-impressionniste, à travers l’utilisation d’éléments naturels : surface d’étangs, sols, écorces d’arbres. L’auteur s’attache, non pas à l’aspect réaliste de ces éléments, mais à leurs relations de forme ou de matière : cercles dans l’eau et coupe d’un arbre aux mêmes formes concentriques, rapprochement des surfaces de l’eau et du gazon. Ces relations sont à la fois mises en évidence et exploitées par un usage systématique de la surimpression. Elles se complètent par des relations de mouvements naturels : branches d’arbres agitées par le vent, envol d’oiseaux et mouvements de caméra.
La rencontre des images et de la musique dans ce film crée, par contraste, un niveau de lecture supérieur car au-delà de la beauté des images naturalistes qui sont montrées à l’écran, la subtile musique concrète de François-Bernard Mache instaure un climat et un sentiment d’inquiétude avec l’utilisation musicalisée de sons de craquements d’arbres prélevés au moment de l’abattage puis mis en boucle, sur fond de scieries, cris de corbeaux, de tronçonneuse, de vent, grenouilles et feuilles écrasées. Plus qu’un simple poème cinématographique tourné vers la contemplation de la nature, le film semble nous mettre en garde sur les dangers qui pèsent sur elle de par l’activité de l’homme.
Production : Service de la Recherche de l’ORTF, 1961
Musique concrète : François-Bernard Mache
Cette notice d’information a été coproduite avec l’INA/GRM pour la création de la fresque multimédia – Artsonores – L’aventure électroacoustique, dans la catégorie Films issus du Service de la Recherche de l’ORTF de 1950 à 1975.
L'ELLIPSE, 2010
Installation sonore
16 micros, 16 trépieds, câbles, carte son wirefire, programme informatique sur DVD, mac-mini
Dimensions variables
Edition de 3 +1 EA
Ce dispositif sonore est composé de microphones sur pieds formant un cercle incliné dans l'espace. Chaque micro est utilisé comme un haut-parleur pour restituer un échantillon audio et pour produire une séquence qui parcourra une ellipse plus ou moins rapide dans l'espace.
A l’instar d’une planète qui tourne autour de l’astre solaire, il s’agit pour ce dispositif de produire des cycles circulaires mais dont la vitesse pour produire une révolution sera variable par accélération ou décélération. En inversant le processus de diffusion d’un son – en utilisant des outils d’enregistrements tels que des microphones à la place d’enceintes – le dispositif crée un trouble quant à la perception habituelle des équipements de sonorisation.
En inversant le processus de diffusion d'un son – en utilisant des outils d'enregistrements tels que des microphones à la place d'enceintes – le dispositif crée un trouble quant à la perception habituelle des équipements de sonorisation. L'aspect sculptural statique de cette installation tranche avec la dynamique produite par les sons permettant de simuler
le mouvement d'un cercle à vitesse variable. Sobre, minimaliste, l'ensemble de microphones donne à voir une ellipse en suspension dont le seul mouvement est crée par le déplacement du son.
Le son diffusé provient des enregistrements réalisés par l'artiste lors de sa résidence à Ny-Alesund (Svalbard, Norvège), village scientifique considéré comme la localité la plus au Nord de la planète. Ces VLF (Very Low Frequencies) sont des fréquences radio naturelles issues de la magnétosphère, et qui sont récoltées et ramenées à la sphère de l'audible.
Le passage du son qui apparaît tel un craquement ou une étincelle, évoque dans sa succession l'idée d'un cycle infini.
Dominique Blais L’Ellipse du 12 janvier au 3 février 2012 vernissage mercredi 11 janvier à 18h
ECOLE SUPERIEURE D'ART DU MANS
Lundi-Vendredi : 13h à 19h – Samedi-Dimanche : 14h à 17h
De 1952 à 1956, le cinéaste et théoricien du cinéma Jean Mitry fréquente les studios de Pierre Schaeffer. Au-delà de ses propres recherches théoriques, Jean Mitry cherche, comme précédemment avec son film Pacific 231 (1949) – construit sur la partition d’Arthur Honegger – à retrouver l’esprit du cinéma d’avant-garde des années 20.
La note d’intention du film de Jean Mitry met également en exergue une mise en valeur des rythmes mécaniques de la vie industrielle contemporaine, transposant le rythme des machines, en un « poème lyrique ». La conjonction du mouvement et des sonorités doit transcender la réalité. En ce sens, il rejoint également l’idée de symphonie de ville dont il est l’un des admirateurs. La musique est fondée sur la rythmique d’un découpage qui s’accorde justement avec les conditions d’un rythme mécanique heurté, violemment cadencé et mesuré. Le scénario du film, c’est-à-dire ce découpage, prévoit avec le mouvement propre et la cadence des machines, le temps relatif de chacun des plans, il fournit en quelque sorte une première structure rythmique sinon musicale de l’ensemble. Pierre Boulez a ainsi créé la substance et l’organisation musicale de son œuvre à partir de cette forme préétablie, en s’y conformant aussi près que possible. Après quoi, la construction et le montage du film s’inscrivent d’eux-mêmes dans la donnée musicale définitive, avec un ajustement du montage final sur les articulations musicales.
« dans cet essai cinématographique en cinémascope (…) des équivalences entre la musique sérielle de Pierre Boulez et les images de machines en mouvement » sont établies. En guise de cinémascope, Mitry opte pour un système de projection en triple écran, à la manière d’Abel Gance, dont on ressent une fois de plus l’influence déterminante.