Même si le métronome est un appareil que tout musicien possède pour travailler son instrument, il n'est pas, à proprement parler, un instrument de musique. Aussi, lorsqu'en 1963, le compositeur hongrois Gyorgy Ligeti crée son Poème symphonique pour 100 métronomes, à Hilversum (Pays Bas), sous sa propre direction, il déclenche un véritable scandale.
Très proche de George Maciunas et Nam June Paik, Ligeti gravite alors dans le sillage du mouvement Fluxus dont on sent toute l'influence dans cette pièce musicale qui relève autant de la musique expérimentale que de l'installation plastique.
Le métronome qui, d'ordinaire, symbolise la rigueur musicale extrême se mue ici en un chaos rythmique que le réglage des cent métronomes à des vitesses différentes ne fait que renforcer. Une oeuvre dont le déroulement permet néanmoins de retourner à la fonction première du métronome lorsque, au terme de la pièce  – qui dure vingt minutes environ  – il ne demeure plus qu'un seul métronome en action.

 ″Les cent métronomes, que l'on laisse battre jusqu'à épuisement, dévidant leur mécanisme de façon simultanée mais à des vitesses différentes, produisent un nuage sonore dont le ″grand diminuendo rythmique″ s'impose comme le ″premier exemple de musique minimale″ (Ligeti) […] ″.

Comme dans les pièces instrumentales de Ligeti, cette oeuvre constitue une expérience sur la matière sonore, en l'occurrence rythmique, exploitant l'idée de modification lente d'un paysage sonore.

Dans la partition, Ligeti indique que l'exécution de la pièce nécessite dix exécutants sous la direction d'un chef d'orchestre pour remonter au maximum le ressort des métronomes et régler les vitesses comme indiquée sur la partition. Au signal du chef, les cent métronomes sont actionnés simultanément. C'est alors, seulement, que le public est invité à pénétrer dans la salle de concert pour s'installer alors que les métronomes s'arrêtent les uns après les autres.

En 1995, le sculpteur Gilles Lacombe, très impressionné par l'écoute de cette œuvre imagine un dispositif qu'il met six mois à concevoir et qui en simplifie considérablement l'exécution grâce à un mécanisme qui démarre simultanément les cent métronomes . C'est avec ce dispositif qu'est présenté ici cette version du Poème symphonique pour cent métronomes, diffusée dans l'émission de création télévisuelle d'Arte, Die Nacht, produite par Paul Ouazan.

Poème symphonique pour cent métronomes (1962)
Création : le 13 septembre 1963, à Hilversum (Pays-Bas), sous la direction du compositeur.

Editeur : Schott