SOS, LES ZLOPS ATTAQUENT, de René Borg (1967)

Le texte et l’extrait vidéo ci-après documentent l’ouvrage de Philippe Langlois, Les cloches d’Atlantis, Musique électroacoustique et cinéma, Archéologie et histoire d’un art sonore, éditions mf, Paris, 2012.

Les zlops habitent une minuscule planète de 125 mètres de diamètre où l’on parle un langage particulier. Ils embarquent un jour à bord de leur astronef, le « Globineff », et partent à la conquête d’un autre astre: la terre. Lorsqu’ils atterrissent à Paris, ils installent leur quartier général entre le deuxième et le troisième étage de la tour Eiffel. L’un des zlops, sur ordre de son supérieur, part en reconnaissance dans les rues de la capitale, muni de son arme au pouvoir hilarant : le « dogodum ».

Ce premier épisode de feuilleton à destination du jeune public réalisé dans le style de la bande dessinée est resté inachevé au 7ème épisode. Il constitue un exemple d’application de la technique de l’animographe, une machine inventée vers 1961 par jean Dejoux chercheur à la RTF au sein du Service de la Recherche destinée à produire des films d’animation de façon rapide et économique.

Un an avant de lancer dans l’aventure des Shadoks de JacquesRouxel, Robert Cohen-Solal compose donc la musique de cette série animée. La musique allie des mélodies légères jouée sur des synthétiseurs et intègre toute une série d’intervention d’éléments concrets et électroniques qui viennent dynamiser et rythmer les moments d’articulations musicales et les péripéties des Zlops.

1er épisode :

2eme épisode :

Cette notice d’information a été coproduite avec l’INA/GRM pour la création de la fresque multimédia – Artsonores – L’aventure électroacoustique, dans la catégorie Films issus du Service de la Recherche de l’ORTF de 1950 à 1975.

LA BELLE CEREBRALE, de Peter Foldès (1968)

Le texte et l’extrait vidéo ci-après documentent l’ouvrage de Philippe Langlois, Les cloches d’Atlantis, Musique électroacoustique et cinéma, Archéologie et histoire d’un art sonore, éditions mf, Paris, 2012.

A quoi rêvent les modèles de peintres pendant leur temps de pause ? L’univers fantasmatique d’une jeune fille préoccupée par sa seule beauté… Un mélange de prises de vues réelles, d’animation et de trucages vidéographiques. La belle cérébrale, c’est un mannequin de mode dénudé que la caméra de Peter FOLDES caresse comme un corps étranger. Indifférente à ce qui l’entoure, cette femme s’ennuie. Elle semble ne pas entendre la conversation vulgaire de deux hommes qui mangent en attendant un certain Léopold qu’on ne verra jamais, pas plus que la radio qui diffuse un reportage angoissant. Pour se distraire, elle se fait les ongles, puis se met à rêver. Un monde imaginaire se substitue bientôt à la réalité, où des objets divers : bonbons, verres de vin, téléphone, fleurs, bijoux, perruque l’accaparent et l’occupent successivement ; objets du désir auxquels l’animation image par image donne une totale indépendance de mouvement. Puis la femme rêve de danse et sur une musique de François BAYLE, son corps dédoublé en couleurs décomposées se reflète et se multiplie comme dans un kaléidoscope. Après des images paroxystiques, le visage de la femme saccadé par les images violentes d’un film d’espionnage, une voix la ramène à la dure réalité du métier de modèle : il lui faut sourire et reprendre la pose pour une toile qui vante « le dentifrice aux fleurs ».

Dès les premières notes du générique, la musique de François Bayle nous place d’emblée dans une époque musicale qui a vu le public plébisciter les Jerks électroniques de Pierre Henry et Michel Colombier extraits de la Messe pour le temps présent de Maurice Béjard en 1967.

Dans le climat social révolutionnaire et contestataire de la fin des années 60, la musique concrète, émanation de la recherche musicale la plus pure cherche à se populariser et se rapprocher d’un public plus vaste non seulement en multipliant les expériences de musiques d’application que ce soit pour le cinéma, le théâtre, le ballets, des spectacles de mimes, de marionnettes, etc., mais également en recourant à un métissage musical de plus en plus fréquent, en particulier avec le jazz, la musique pop ou bien le rock psychédélique.

Après Luc Perini et Bernard Parmegiani, François Bayle s’empare donc à son tour et avec bonheur du contraste qui résulte du mariage des univers décalés de la musique concrète en lien avec des sonorités pop/rock-psychédéliques.

Dans ce film dont l’image ne montre finalement que la figure du modèle féminin, le son occupe une place essentielle pour générer tout un univers musical délirant à travers un hors champ sonore des plus riche et délicat.

Cette notice d’information a été coproduite avec l’INA/GRM pour la création de la fresque multimédia – Artsonores – L’aventure électroacoustique, dans la catégorie Films issus du Service de la Recherche de l’ORTF de 1950 à 1975.

ELECTRORYTHMES DANSE de Peter Foldès (1968)

Le texte et l’extrait vidéo ci-après documentent l’ouvrage de Philippe Langlois, Les cloches d’Atlantis, Musique électroacoustique et cinéma, Archéologie et histoire d’un art sonore, éditions mf, Paris, 2012.

Reprenant le thème principal des films de Peter Foldès : l’idée de transformation de l’image iconique de la femme, les musiques de films que Bernard Parmegiani compose pour Foldès, sont à chaque fois l’occasion de métisser la musique électroacoustique avec d’autres genres notamment des musiques populaires de l’époque : la musique pop dans Je tu elles (1967) qui se matérialise dans son catalogue par Pop Eclectic (1968), le Jazz, dans ElectroRythmes (1966), Jazzex composée la même année,

Après avoir coupé, découpé, assemblé puis monté les différents fragments de l’improvisation d’un trio de jazz, Bernard Parmegiani a imaginé une forme en arche figurée par l’utilisation d’un puissant filtre par gamme de fréquences de marque Krohn-Hite.

Au début et à la fin de la pièce, le trio de jazz semble émerger et disparaître totalement dans les tréfonds d’un filtrage grave. La clé de voute de cette forme symétrique est révélée progressivement et correspond brièvement avec le moment où le filtre n’a plus d’effet et donne à entendre toute la bande bande passante du trio jazz avant de basculer de nouveau lentement vers le registre grave.

Les articulations dans le montage de la musique sont ponctuées par des interventions d’éléments concrets, frottement de métal et autres trames électroniques.

Cette notice d’information a été coproduite avec l’INA/GRM pour la création de la fresque multimédia – Artsonores – L’aventure électroacoustique, dans la catégorie Films issus du Service de la Recherche de l’ORTF de 1950 à 1975.

LA PLANETE VERTE, de Piotr Kamler (1966)

Le texte et l’extrait vidéo ci-après documentent l’ouvrage de Philippe Langlois, Les cloches d’Atlantis, Musique électroacoustique et cinéma, Archéologie et histoire d’un art sonore, éditions mf, Paris, 2012.

Quelque part dans l’espace, la galaxie RK12 est située à 3000 années lumière de la terre, où se trouve une planète habitée dénommée « Acture la verte » sur laquelle vivent « les Actuphages » ayant une apparence qui peut être située entre l’amibe, la puce et la chenille et dont le comportement, pour éviter la monotonie, est de sans cesse changer de formes : « dis moi comment tu changes, je te dirais qui tu es » dit le proverbe Acture. Bien que sourds, les Actuphages adorent la musique et font également vibrer des instruments à cordes sur lesquels ils se promènent, ce qui les inspirent pour changer de forme. Mais leur activité principale est de fabriquer du temps, du temps à perdre, du temps qui ne passe pas, du temps à gagner, sans parler des temps morts…

Si dans le cadre d’une recherche sur des programmes destinés au divertissement télévisuel expérimental à portée humoristique, Planète verte préfigure la célèbre série des Shadoks mêlant science-fiction, pataphysique et humour, ce film représente surtout d’un point de vue thématique et graphique une anticipation de presque vingt ans sur la réalisation du long métrage d’animation de Piotr Kamler en 1982 : Chronopolis sur une musique de Luc Ferrari. La trame narrative y semble en effet directement puiser sa source dans Planète Verte où, tout comme les actuphages, ses habitants consacrent leur temps à fabriquer du temps.
C’est bel et bien une fois encore la notion de transformation de la matière qui est au centre de ce court métrage réalisé à partir de l’animation de poudres blanches. Pourtant, la musique d’Ivo Malec prend à contrepied cette notion en ne recourant qu’à une formation instrumentale dont les principes de composition sont directement hérités de la composition de musique concrète. A la manière du « Mickey Maousing », Ivo Malec compose une musique « illustrative » qui épouse le mouvement des formes qui se déploient à l’écran en se calant sur la virtuosité de transformation des actuphages.

Cette notice d’information a été coproduite avec l’INA/GRM pour la création de la fresque multimédia – Artsonores – L’aventure électroacoustique, dans la catégorie Films issus du Service de la Recherche de l’ORTF de 1950 à 1975.

UN GARCON PLEIN D’AVENIR de Peter Foldès (1965)

Le texte et l’extrait vidéo ci-après documentent l’ouvrage de Philippe Langlois, Les cloches d’Atlantis, Musique électroacoustique et cinéma, Archéologie et histoire d’un art sonore, éditions mf, Paris, 2012.


Film d’animation conçu et réalisé par Peter Foldès sur un scénario sombre qui peut être vu comme une métaphore de la cruauté humaine à travers la croissance d’un homme depuis sa naissance où déjà bébé, allaité par sa mère, il finit par la dévorer. Devenu adulte, il fait l’expérience de sa force, de la guerre et se livre à la destruction de tout ce qui est à sa portée. C’est la musique romantique de Schubert qui semble redonner à ce personnage ultra violent un visage humain et lui permettre de ressentir les sentiments du remord puis de l’amour. Cette accalmie n’est cependant que de courte durée et ses pulsions meurtrières reprennent vite le dessus à cause des provocations d’une femme impudique. Reprenant sa marche dévastatrice il finit par périr, écrasé par une force encore plus grande que lui.

Bien qu’appartenant au registre du dessin animé, le film n’en demeure pas pour autant destiné au jeune public.
Le parti pris de la piste sonore de Luc Périni est conçue comme une véritable musique à programme oscillant entre une bande sonore à la fois stylisée et illustrative représentant les aventures de ce personnage monstrueux en recourant, notamment, à toute une imagerie sonore directement prélevée dans des registres référentiels (boxe, cris, foule, bruits de guerre, extrait du premier mouvement de la symphonie n°8 de Franz Schubert).
La musique pendant le générique de début reprend des rythmes martiaux jouées avec une caisse claire à peine déformée ainsi que des trames d’une musique concrète stridentes et évolutives qui semblent figurer le danger et la cruauté grandissante de ce monstre sanguinaire

Cette notice d’information a été coproduite avec l’INA/GRM pour la création de la fresque multimédia – Artsonores – L’aventure électroacoustique, dans la catégorie Films issus du Service de la Recherche de l’ORTF de 1950 à 1975.

GANTZ GRAF de Autechre (2002)

Encore un exemple qui œuvre dans le sens d'une recherche audio graphique absolue, cette fois-ci sous la forme figurative d'une machinerie géante abstraite en mouvement dans le clip vidéo du morceau Gantz Graf, (2002) du groupe britannique Autechre, fondé en 1991 par Rob Brown et Sean Booth, devenu l'un des jalons du label Warp.

(1996) ENUMA ELISH de David Duponchel

Enuma Elish est à double titre un film fondateur pour lequel j’ai composé la musique après plusieurs autres courts-métrages de David Duponchel depuis le début des années 90, c’est le premier film qui a bénéficié d’une véritable production. La musique électroacoustique et plus largement toute la bande sonore ont été composé au studio de Francis Faber, La Grande Fabrique à Dieppe. Ce film est également fondateur puisqu’il est à l’origine de mes travaux de recherche sur la musique électroacoustique au cinéma donnant lieu à un DEA puis une thèse en musicologie à Paris IV soutenue en 2004, sous la direction de Jean-Yves Bosseur et Marc Battier qui fut ensuite publié aux éditions mf en 2012 sous le titre Les cloches d’Atlantis, musique électroacoustique et cinéma archéologie et histoire d’une art sonore.

Tourné en noir et blanc et couleur, en 16mm scope grâce au procédé Tronchet, il a ensuite été gonflé en 35mm ce qui lui confère le grain si particulier d’image. Aucune équipe de prise de son n’étant présente sur le tournage d’Enuma Elish, c’est l’intégralité des sons du film, des dialogues et des bruitages qui a dû être refait en post production.

Extrait des trois premières minutes en version basse définition et compressée.

LE TERRITOIRE DES AUTRES de François Bel et Gerard Vienne (1970)

Le texte et l'extrait vidéo ci-après documentent l'ouvrage de Philippe Langlois, Les cloches d'Atlantis, Musique électroacoustique et cinéma, Archéologie et histoire d'un art sonore, éditions mf, Paris, 2012.

Dans Le territoire des autres (1970) « délibérément conçu pour l’image et le son à l’exclusion des paroles », François Bel et Gérard Vienne ont tourné pendant six ans plus de quarante-cinq kilomètres d’images d’animaux à travers toute l’Europe. Ne possédant pas encore d’expérience en tant que réalisateurs, ils tournent les séquences sans plan ni idée préconçue. Michel Fano se propose de réaliser le montage de l’image sur une structure musicale « à la manière de la fugue dont s’est servi Eisenstein pour Octobre ». Pendant plus d’un an, il devient à la table de montage le réalisateur a posteriori du film.

« La création se fait au stade du ciseau et du scotch, sur la table par rapport à l’image et par rapport aux deux, trois ou quatre sons associés au phénomène sonore ».

    Michel Fano peut ainsi modifier le montage image de certaines scènes par rapport à la conception sonore qu’il s’en fait. C’est ainsi que progressivement, images et sons se sont adaptés, imbriqués les uns aux autres. Le film a alors pris la forme d’une symphonie en dix mouvements (la pollution, le camouflage, la survie, la reproduction, le cri des animaux, etc.), avec une ouverture et une coda. Les sons instrumentaux s’y intègrent aux sons naturels puis aux sons transformés jusqu’à créer le continuum sonore recherché.

Générique du début

Séquence de l'embryon

CŒUR DE SECOURS de Piotr Kamler (1973)

Le texte et l'extrait vidéo ci-après documentent l'ouvrage de Philippe Langlois, Les cloches d'Atlantis, Musique électroacoustique et cinéma, Archéologie et histoire d'un art sonore, éditions mf, Paris, 2012.

En 1973, François Bayle collabore une fois encore avec Piotr Kamler pour illustrer un petit film d’animation qui s’intitule Cœur de secours. Une nouvelle fois, Piotr Kamler transporte le spectateur dans un monde onirique et étrange, qui met en scène un funambule, un équilibriste ainsi qu’un petit personnage qui transporte précieusement un cœur entre ses mains. Le petit homme se déplace tantôt à pied, tantôt à vélocipède, dans un monde surnaturel constitué d’engrenages, de mécaniques imaginaires. Dans cette atmosphère hostile, manipulée, l’amour qu’il tente de préserver apparaît comme plus fragile, plus difficile à protéger.
La musique de François Bayle illustre cet univers à l’aide de boucles sonores en évolutions constantes à partir de sons de clarinette basse et de boîte à musique. Selon les tableaux, ces boucles sont transposées dans différents registres pour matérialiser la répétition et la transformation des saynètes traversées. Cet univers sonore minimaliste, peuplé de petits sons discrets, composé comme une aquarelle de Raoul Dufy, se résume à quelques lignes, quelques taches qui se fondent sur la structure des images.
 

GALAXIE de Piotr Kamler (1964)

Le texte et l’extrait vidéo ci-après documentent l’ouvrage de Philippe Langlois, Les cloches d’Atlantis, musique électroacoustique et cinéma archéologie et histoire d’un art sonore, éditions mf, Paris, 1er trimestre 2012.

« Entre le désir et le spasme, entre la puissance et l’existence, entre l’essence et la chute, tombe l’ombre ». C’est autour de cette citation de T-S Eliot que se développe le film abstrait de Piotr Kamler baignant dans une couleur à dominance rouge tant au niveau des arrières plans qu’au niveau des formes qui traversent l’écran afin d’évoquer de façon abstraite la vie et la puissance d’une forme rouge, lointaine galaxie, sur laquelle des éléments extérieurs, envahisseurs, apportent l’ombre et la destruction.
Film expérimental dont la diffusion à la télévision n’est pas mentionné dans le catalogue du Service de la Recherche et qui condense les travaux de recherche fondamentale audiovisuelle sur les notions d’objets visuels et sonores.

La musique de François Bayle, tout comme le film de Kamler, se déploie essentiellement à partir de trois éléments audiovisuels saillants : un arrière plan qui se développe tout au long du film qui se présente sous la forme d’une trame sonore ralentie obtenue, semble-t-il, à partir de tenues d’orgue mélangées avec des sons bruités pour accompagner la traversée des nuages de matières rouges, des sons percussifs en delta, joués à l’endroit à l’envers pour ponctuer l’apparition de formes moins nébuleuses à l’image, puis des sonorités qui rappellent l’amplitude et la dynamique du langage parlé improbable par le biais du filtrage pour figurer des fourmillements de matière et de formes qui dansent sur l’écran.
Cette approche audiovisuelle n’est pas sans rappeler Lignes et points, autre expérience audiovisuelle majeure qui réunit de nouveau Piotr Kamler et François Bayle.

Cette notice d’information a été coproduite avec l’INA/GRM pour la création de la fresque multimédia – Artsonores – L’aventure électroacoustique, dans la catégorie Films issus du Service de la Recherche de l’ORTF de 1950 à 1975.