Ce film s’inscrit dans la série documentaire « Image d’une oeuvre » produite par l’Ircam qui vise à documenter aujourd’hui, tout le déroulement du processus créatif d’un compositeur ou d’une compositrice confronté à l’utilisation de la technologiz pour prolonger les enjeux artistiques et expressifs de son projet musical.
Le film de Véronique Caye propose de suivre les différentes étapes de la fabrication de l’œuvre de Francesco Filidei et d’en saisir les enjeux artistiques et technologiques notamment conçu grâce à la technologie des SmartInstrument, dit instruments augmentés développés à l’Ircam.
Bande annonce de la série Images d’une œuvre # 20 : Notturno sulle corde vuote pour quatuor et électronique de Francesco Filidei, un film de Philippe Langlois et Véronique Caye.
Création de l’œuvre et projection du film le 15 janvier 2016 à la Philharmonie de Paris.
Documentaire de création de Véronique Caye librement inspiré du roman d’André Breton « L’amour fou »
Sur les traces du roman L’Amour Fou, le film convoque dix comédiens sur les bords de Seine. Chacun se prête au jeu surréaliste de répondre à la question d’André Breton :
Pouvez-vous dire quelle a été la rencontre capitale de votre vie ? Jusqu’à quel point cette rencontre, vous a-t-elle donné, vous donne -t-elle l’impression du fortuit ? Du nécessaire ?
André Breton, L’amour fou
Avec / With Vanessa Bettane Sébastien Despommier Sandrine Juglair Jean-Charles Gaume Andy Gillet Julien Mages Pierre Mignard Asthar Muallem Jean-Philippe Rossignol Joséphine Serre Fanny Sintes
LeFilm des questions se compose ainsi d’un livre et d’un film. Le livre dit qu’il est à voir, le film montre qu’il est à lire. Le Film des questions interroge le statut du paysage en tentant d’appréhender, par son décor, un fait divers nous laissant impuissants : en mars 2009, un homme assassine dix personnes avant de mettre fin à ses jours, le long d’un itinéraire courant de Kinston à Geneva, en Alabama. Dans un écart de temps et de lieu, Frank Smith réinvestit cet événement désarmant en questionnant les rapports vivants entre faits, récit, image et langage. Frank Smith revisite via Google Street View la route parcourue par l’homme ce jour-là, non sans évoquer le film AKA Serial Killer dans lequel Masao Adachi expérimente sa « Théorie du Paysage », tentant d’appréhender, par ce dernier, le cheminement d’un serial killer.
Pour Hors Pistes, Frank Smith mêle la projection de son film avec une lecture musicale de son livre, en direct, par les comédiens Garance Clavel et Adrien Michaux, sur une musique du compositeur Philippe Langlois.
Le show est le moment d’une transformation: indice que la catastrophe peut commencer, commence, et sera, ici ou ailleurs, menée jusqu’à son terme.
Diffusion
Pera Museum, Istanbul, 11 & 18 mars 2015
Musée de la Chasse et de la nature, Vidéo for ever, Paris, 22 juin 2015
Grâce à Wavelenght (1966-67), couronné lors du Grand Prix du Festival international du film expérimental de Knokke-le-Zoute en 1968, Michael Snow acquiert une véritable notoriété en tant que cinéaste. Les premières minutes de Wavelenght donnent à voir une pièce en plan d’ensemble, en légère plongée dans un atelier : au fond de la pièce un bureau et sa chaise, équipé d’une radio et d’un téléphone ; en face une autre chaise avec, au-dessus, quelques photos fixées au mur. Le mur est percé de deux grandes fenêtres qui donnent sur la rue. Le sol est recouvert d’un plancher, au plafond, deux néons éclairent la pièce.
Deux hommes viennent déposer une étagère : le son est synchrone ; les bruits de la rue sont entendus en synchronisation. Nous sommes dans la réalité. Mais voici que quelque chose se passe : l’image bouge, progressivement, le cadre se resserre, nous nous approchons des fenêtres. Comme le dit Michael Snow, « un lent mouvement de zoom trace devant le spectateur son destin et le destin du film ». Le son synchrone est remplacé par un bourdonnement, une onde sinusoïdale qu’aucun rythme ne vient perturber, qui se déplace tout doucement vers l’aigu et recouvre dès lors tout le film. Une lente progression gravit les fréquences du spectre sonore de quatre mille à douze mille Hz. Pendant que le zoom se resserre, la pièce traverse le jour puis la nuit. La temporalité est bouleversée ; plusieurs petites scènes distinctes ont lieu, dont un meurtre entendu hors champ ainsi que plusieurs déménagements. Ces saynètes ne sont pas reliées entre elles sur le plan narratif. Inlassablement le zoom se poursuit pendant plus de 40 minutes, traversant toute la pièce pour s’achever sur un plan resserré d’une photographie de vagues accrochée au mur entre les deux fenêtres à côté du portrait d’une Walking Woman.
Dans un entretien, Michael Snow a confié qu’il avait cherché à trouver un équivalent sonore au mouvement du zoom de la caméra. Au départ, il avait pensé jouer sur la dynamique du son et réaliser un crescendo en partant d’un son très ténu qui aboutisse à un son très fort. Mais la durée du film, quarante minutes, ne permettait pas de concrétiser cette idée. Il a alors l’idée de créer un son qui puisse franchir toutes les fréquences du spectre dans les limites de la bande passante de la piste optique. « Il y a comme un effet cosmique, qui apparaît dans cette idée, un peu comme le sujet du film qui questionne la réalité de la représentation cinématographique ». Michael Snow cherche à opposer la vérité de l’image et du son à la vérité de l’illusion sur l’écran. Le film dirige le spectateur vers cette question : « Si ce n’est pas une chambre que je vois sur l’écran alors qu’est-ce que c’est ? »
Entre cette fréquence sonore et la photographie des vagues, il s’effectue en premier lieu un rapprochement sémantique par l’entremise du mot Wave. Wavelenght signifie en effet autant « longueur d’onde » que littéralement « durée de vague », autrement dit le temps qu’il faut pour parvenir jusqu’aux vagues ou bien, plus métaphoriquement, l’unique mouvement de caméra qui se jette vers l’avant serait lui-même une vague qui déferle très longtemps. « Il y a également une force cosmique dans Wavelenght, quelque chose qui touche au temps à l’échelle humaine, mais également quelque chose qui le dépasse ». L’écoulement normal du temps est matérialisé par le son direct tandis que les dilatations temporelles ne sont signifiées que par la fréquence ascensionnelle. Dans Wavelenght, le trucage employé, donnant à voir un zoom régulier, n’est en fait qu’une succession de scènes filmées et d’instants photographiques reliés entre eux. Avec ce dispositif, Michael Snow cherche à toucher aux fondements même du septième art, en démontrant que le cinéma n’est pas autre chose que de la photographie, du son et du temps.
En 1968, Maurice Blackburn produit et réalise son propre film Ciné-crime dont il est fait mention au générique que « les éléments visuels et la bande sonore de ce film sont les points de repère d’une histoire qui doit être complétée selon la fantaisie de votre imagination ».
L’image en noir et blanc à travers un jeu d’ombres et de lumières, est plus suggestive que figurative. Des fragments de gestes donnent à imaginer un voleur poursuivi par la police, rattrapé, jugé, jeté en prison, puis préparant son évasion. La bande sonore guide le spectateur dans la narration, plus que les images elles-mêmes, volontairement occultées par des effets de flous stylisés. Elle met en évidence l’approche électroacoustique de la musique de film de Maurice Blackburn dans laquelle tous les sons – aussi bien les paroles, les bruitages, que la musique elle-même – sont considérés comme des objets sonores.
Cette bande-son n’a donc plus uniquement une fonction de sonorisation, elle n’est plus appliquée comme un vernis sur un visuel terminé qui possède déjà tout son sens, mais elle acquiert un rôle actif, elle enrichit le film par ses propres moyens expressifs.
Véritable cinéma pour l’oreille, la musique de Ciné-crime démontre la conception d’une bande-son active au regard d’une image volontairement brouillée. Les manipulations sonores sont pour notre perception une réalité bien plus évidente que ce qu’il nous est donné de voir.
Au Canada, au sein de l'Office National du Film (ONF), le compositeur de musique de films Maurice Blackburn est l'un des fers de lance de l'expérimentation sonore tous azimut tout d'abord aux côtés du cinéaste d'animation Norman McLaren, puis pour des films documentaires ou de fiction.
Après deux séjours à Paris, en 1948 et 1954, il découvre la musique concrète de Pierre Schaeffer, et prend alors conscience du formidable champ d’exploration que lui offre la possibilité de manipuler le son enregistré sur piste optique avant d'appliquer ces découvertes dans des collaborations avec des réalisateurs qui souhaitent prolonger leur expérience visuelle dans l’univers des sons.
Selon lui, le compositeur doit prendre en charge le son d’un film d'une manière globale, dès la phase d'écriture du film, en collaboration avec le cinéaste, le monteur image et le monteur son. C’est l’ensemble de la piste sonore qui devient ainsi la musique du film dans une approche électroacoustique totale où paroles, musiques et bruits sont exploités musicalement dans une esthétique qu'il nomme "Filmopéra".
Dans les années 60, l'idée de collage sonore et de contrepoint audiovisuel prend un tour nouveau avec le film de Clément Perron Jour après jour qui lui offre l’occasion de produire une bande sonore totale composée à partir de musique concrète, de bruits industriels et d’effets divers enregistrés en studio ou pris en sonothèque : « on est allé chercher de tout, dit Maurice Blackburn, galopades de chevaux, bruits de trains, sifflets, arbres s’écroulant, bruits de machines ». Ce film a été tourné à Windsor au Québec au milieu des forêts, où six mille cinq cents habitants vivent de l’industrie du papier. Un texte de Clément Perron dit par Anne-Claire Poirier est entièrement intégré à cette composition. Le mélange texte-images-bande-son donne à réfléchir sur la place que l’homme a fait à la machine dans notre société. Il en résulte un poème sonore total chantant la domination universelle de la machine devenue folle.
Dernier né de la collection de livres/disques Zagzig, aux éditions DisVoir, CROSSFADING est une expérience sonore inédite réalisée dans le cadre d’une installation de l’artiste Loris Gréaud lors de séances participatives qu’il organise depuis cinq ans dans différents musées à travers le monde.
Conçue pour un système de diffusion sonore binaural – procédé découvert par Heinrich Wilhelm Dove en 1839 – cette installation consiste à envoyer dans chaque oreille, à l’aide d’un casque, des fréquences très proches les unes des autres créant un battement à même de générer des ondes Alpha. Ces ondes caractérisent un état de conscience apaisé, et sont principalement émises lorsque le sujet a les yeux fermés. Elles surviennent lors d’état méditatifs, notamment au moment de l’endormissement de sorte que l’esprit reste éveillé mais le corps endormi comme dans un état de relaxation et de méditation profondes.
CROSSFADING joue donc de ce phénomène perceptif pour conduire progressivement l’auditeur au seuil de l’endormissement et lui permettre d’accéder à des rêves éveillés et à des hallucinations tant auditives que visuelles.
CROSSFADING, est un livre d’artiste qui inclut le CD de l’enregistrement live de la dernière installation de la pièce sonore présentée au Whitney Museum à New York. Il donne aussi à voir l’IRM des hémisphères cérébraux de l’artiste sollicités au cours de l’écoute de cette expérience rare.
CROSSFADING propose ainsi une expérimentation artistique comme vaste entreprise pour « endormir le monde » visant à un état de conscience insoupçonné où chaque auditeur/lecteur est invité à explorer les confins de sa propre psyché.
Détendez-vous et, pour un effet optimum, faites un essai d’écoute binaurale au casque pour une expérience littéralement sensationnelle !
La Marche funéraire des ouvriers a probablement été conçue comme une suite à la Symphonie des sirènes de Baku composée en 1922, pour le cinquième anniversaire de la révolution russe. Outre la chorale de ce chant qui est d’une facture totalement conforme à la tradition musicale sacrée de la Russie orthodoxe, sa grande innovation réside dans le fait qu’en lieu et place de l’orchestre, ce sont les sirènes à l’échelle de toute la cité industrielle qui se sont substituées aux instruments de musique.
La mue de la Révolution s’est ici produite jusque dans la musique. Avraamov l’avait déjà célébré à Baku, puis à Nivni Novgorod et Moscou les années suivantes, cherchant à étendre les pupitres de à l’orchestre à la ville toute entière, faisant retentir sous ses ordres, canons, sirènes, cornes de brumes, sifflets à vapeurs des trains au milieu d’autres manifestations sonores détonantes. Cette fois-ci, à la place de la tradition séculaire des cloches des églises de l’ancienne religion orthodoxe, le glas funéraire est à présent donné par un son qui symbolise ce nouvel ordre sonore qu’une autre révolution, industrielle celle-là, a renversé puis remplacé par les sirènes des usines. Ces usines monumentales d’où l’on entend résonner les sirènes qui, désormais , rythment le quotidien et la journée de tous les ouvriers.
La musique industrielle devient alors un formidable outils de la propagande soviétique.
Edgard Varèse avait certes déjà introduit la sirène au milieu de son orchestre notamment dans Amériques (1918-1921), puis dans Hyperprism (1923) et Ionisation (1933), elle se retrouve également dans le film Ballet Mécanique (1924) de Fernand Léger et Dudley Murphy sous la conduite musicale de George Antheil, mais avec cet exemple, dans un geste encore plus radical, Avraamov remplace tout l’orchestre par le son des sirènes pour accompagner ce chant choral funéraire.
Pour la mort de ses enfants, l’usine pleure donc aussi ses « fidèles », martyrs d’une autre sorte, mort pour la cause collectiviste, célébré au son des sirènes qui sonnent le glas des ouvriers morts au travail. Après tout, il est bien normal dans un monde où « le plan », le soviétisme et le stakhanovisme ont supplanté la religion, que la musique funéraire de ces ouvriers soit interprétée par l’usine elle-même.
Avec cet exemple,qui illustre l’un des plus purs produits du futurisme et du constructivisme russe, nous touchons, à la notion d’une musique prolétarienne qui, évidemment, s’oppose le plus radicalement possible à la musique bourgeoise de salon.
Dans le même temps, la musique sort de l’espace confiné de la salle de concert, pour investir un autre espace, bien plus vaste, qui se comprend maintenant à l’échelle de tout l’espace urbain et industriel.
Il faut imaginer cette scène où la chorale est disposé au centre d’une place et interprète ce chant religieux entouré par le son des sirènes qui résonne de part et d’autre de toute la ville aux alentours.
En voici une reconstitution sonore de Leopoldo Amigo et Miguel Molina paru en 2008 dans l’indispensable coffret Baku Symphony of Sirens, qui regroupe reconstitution sonore et archives d’époque de l’avant garde russe.
Retrouvez d’autres informations sur le site Monoscop qui regroupe de nombreuses informations sur Arseny Avraamov.
Par son intimité avec la nature, Oona évoque le monde des souvenirs, les réminiscences de l’enfance insouciante figurée par le jeu d’une fillette qui prend vie devant la caméra de Gunvor Nelson. Elle fait la rencontre et devient amie avec Steve Reich au San Francisco Mime Troup où, aux côtés de son mari, le cinéaste Robert Nelson, elle participe aux activités artistiques de cette troupe de théâtre contemporain en recherche de nouvelles formes. Dans ce cadre, dès 1964, Steve Reich participe à la réalisation de deux films de Robert Nelson The Plastic Haircut et Oh Dem Watermelons. Dans ce dernier film, il travaille à partir d’un chant sur le thème de la pastèque, un chant populaire qui peu à peu, se transforme en une musique répétitive surprenante pour accompagner les mésaventures d’une pastèque dans ce registre plutôt « humoristique » tout en augurant des polyphonies rythmiques vocales que Steve Reich développera dans les années 70.
Pour en revenir à My Name is Oona, Gunvor Nelson demande donc à Steve Reich, de composer une musique originale qu’il conçoit uniquement à partir d’enregistrement réels recomposés sur bande magnétique.
D’emblée, le film montre une relation audiovisuelle forte. Après le générique où l’on peut lire le titre, « My Name is Oona » sur un fond noir, le silence se prolonge sur les premières images en gros plan d’une fillette blonde qui se dandine. Elle s’adresse en silence à la caméra, c’est à ce moment que la bande son surgit, de manière décalée, pour donner à entendre l’enregistrement d’une fillette qui déclare avec entrain « My Name is Oona ».
Bien que la voix soit désynchronisée, le lien entre le titre, les premières images et la bande son, loin d’opérer une rupture audiovisuelle, ne fait, au contraire, que la renforcer.
A partir de cet enregistrement étalon, Steve Reich ne conserve finalement que le fragment « Oona ». Isolé, mis en boucle, répété ensuite de manière lancinante se transformant peu à peu du fait du déphasage qui se crée entre les deux magnétophones sur lesquels sont lus en même temps ce même fragment. Cette manière de débuter sa musique n’est pas sans faire directement référence à ses expérimentations sonores à cette même époque, notamment en ce qui concerne l’emploi de la boucle, puis le déphasage de ces boucles, à l’instar des œuvres composées sur le même principe : It’ Gonna Rain (1965) et Come Out (1966).
Le choix de ces éléments sonore fait écho avec le thème même du film, le souvenir. L’enregistrement fixe l’instant, avant le temps de la réécoute le transforme en souvenir, une réminiscence sonore. Pour accompagner ces images de souvenirs resurgis, la voix d’une fillette est donc enregistrée, avec la patine particulière du son optique. Peut-être s’agit-il de la voix de l’enfant qui apparaît à l’écran ? peut-être est-ce la voix de Oona, probablement. Qui est Oona ? Le film ne le dit pas. « C’est un souvenir d’un autre temps » dirait Chris Marker… nous ne saurons pas.
Les images offrent un contraste saisissant avec les boucles de la musique où Nelson travaille davantage au niveau de la superposition plutôt que de la répétition. Au début donc, une fillette en gros plan, puis des branches, des feuilles qui ondoient au soleil dans le vent puis, de nouveau, le visage d’une autre jeune fille.
La deuxième partie apparaît avec un nouveau son documentaire, brut, où la voix de la petite fille, encouragée par sa famille, on suppose, annone les jours de la semaine en anglais. Suivent d’autres enregistrements de cette même enfant où elle décline sur tous les tons « My Name is Oona ». Reich procède alors à lente accumulation et une superposition de cette nouvelle manière jusqu’à lentement créer une gigantesque polyphonie réverbérante qui s’intensifie avant de disparaître pour céder délicatement la place au chant d’une berceuse chantée par la voix aimante d’une maman qui fredonne pour son enfant.
Un film fascinant !
My Name is Oona n’est pas une œuvre isolée sur le plan esthétique, on retrouve des principes de composition audiovisuels similaires pour d’autres films expérimentaux de la même période : Berlin Horse (1970) de Malcom LeGrice sur une musique de Brian Eno ou T O U C H I N G de Paul Sharits où se répète inlassablement le mot « destroy ».
Pendulum Music est une pièce conçue pour 2, 3, 4 ou X microphones, amplificateurs, enceintes et exécutants.
Au milieu des années 60, a New York, les travaux d’artistes conceptuels tels que Sol Lewitt, Richard Serra, Bruce Nauman et Michael Snow sont plus ou moins associés au courant du minimal art. Steve Reich représente, en quelque sorte, la figure musicale au sein de ce mouvement. Il expérimente alors à partir de l’agencement de dispositifs sonores électroacoustiques. A mi chemin entre l’installation sonore et la pièce musicale, Pendulum Music se situe donc dans la poursuite des travaux de Reich sur le déphasage de boucles de bande magnétique sur magnétophones comme, par exemple, dans Come Out (1966) ou It’s Gonna Rain (1967)
Pendulum Music fut présentée pour la première fois en 1969, lors d’une session d’été à l’Université du Colorado, intégré à un spectacle multimédia intitulé Over evident Falls en collaboration avec l’artiste peintre Bill Wiley. L’événement est relaté par Steve Reich comme « un Happening pensé à la va vite » dans une mise en scène où les spectateurs, assistent à l’événement au milieu d’une pluie de faux flocons de neige éclairée par des tubes de néon de lumière noire. Une photo de la performance du 2 mai 1969 au Whitney Museum of American Art de New York, montre les artistes Richard Serra, James Tenney, Bruce Nauman et Michael Snow prêt à donner la première impulsion au balancement des microphones.
Le principe sonore de la pièce est simple et repose sur le mouvement de balancement imprimé à des microphones suspendus au dessus d’enceintes provoquant un effet périodique de larsen.
Dans un lent processus de ralentissement, l’amplitude du balancement diminue, des effets de déphasage se produisent entre les différents microphones. La forme de la pièce se fond alors dans le lent processus qui est fonction de la durée des balancements des microphones jusqu’à la stabilisation au dessus des enceintes créant alors des effets de larsens continus. A la périodicité et au rythme du début de la pièce se substitue peu à peu des fréquences modulantes déplaçant l’écoute non plus sur le rythme mais sur le paramètre de la hauteur.
L’écoute se porte également sur le phénomène acoustique et les variations de plus en plus infimes de la structure du larsen lorsque les microphones oscillent lentement, proches de l’immobilisation. Pendulum Music s’inscrit aussi pleinement dans l’idée d’une œuvre poly-sensorielle se donnant autant à voir qu’à entendre, permettant à l’œil de percevoir les micro modulations de la matière sonore par le biais du mouvement de balancement des microphones.
La « partition » de l’œuvre, qui est en réalité un simple texte manuscrit de Reich, a été écrite en août 1968, et révisée en mai 1973 par le compositeur. Elle indique que les exécutants après avoir impulsé le premier mouvement au balancement des microphones doivent rejoindre l’assistance pour assister à son déroulement.
Voici deux versions de la pièce.
Reconstitution de la mythique pièce de Steve Reich à l’école des beaux Arts du Mans, le 21 novembre 2014 dans le cadre de mon cours : Histoire et théorie du sonore.. Interprètes : Pierre-Marie Blind, Léo Urriolabeitia, Koré Préaud, Tanguy Clerc, Arthur Chambry, Rémy Hertrich.